Tout nous fuit...
Tout nous fuit...
Tout nous fuit, l'homme meurt, les âmes ont des ailes;
Ainsi qu'une fumée active à l'horizon
Le souffle bondit hors des charnelles prisons;
Aux terrestres désirs l'être n'est plus fidèle!
Se peut-il? Respirer semble une trahison!
La vie a pour soi-même une haine mortelle.
- Reverrons-nous un jour une heureuse saison
Avec son déploiement de minces hirondelles
Et son ciel bleu versé sur les toits des maisons?
Reverrons-nous, avec de limpides prunelles,
L'étoile qui s'entr'ouvre à la chute du jour,
Dans le soir sensitif et pareil à l'amour?
Percevrons-nous avec une oreille paisible
Le vaporeux tissu du doux chant des oiseaux
Etincelant ainsi qu'un rayon invisible,
Et la Nuit naviguant sur le calme des eaux?
- Destin, nous rendrez-vous, après des heures telles
Que le globe à jamais semble hostile aux humains,
L'ineffable douceur de prendre une autre main
Quand les parfums du soir lentement s'amoncellent
Sur la rêveuse paix déserte des chemins?
Nous rendrez-vous, malgré ce qui meurt et chancelle,
Le goût naïf et sûr des choses éternelles?...
Mars 1915